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Education sexuelle, un devoir pour l’Education nationale

Éducation sexuelle, un grand vide qui laisse à penser que l’Éducation nationale ferait bien de revoir sa copie sur le sujet. Les lois se succèdent : 2001 puis 2010. Résultats ? Un dispositif inefficace, peu ou mal appliqué, une ignorance affligeante et des comportements inquiétants.

Éducation sexuelle à l’école, on en est où ? Deux lois lois se sont succédées : 2001 avec l’obligation de transmettre aux élèves “une information et une éducation à la sexualité”, 2010 avec le commandement de programmer “à tous les stades de la scolarité” une “information consacrée à l’égalité entre les hommes et les femmes, à la lutte contre les préjugés sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple”. Depuis, rien n’avance. Odile Fillod, chercheuse indépendante en sociologie des sciences et de la vulgarisation scientifique, spécialiste des questions de sexe/genre, lance un cri d’alerte. Il est temps de réagir ! “[…] intégrer aux programmes scolaires l’acquisition de connaissances scientifiques et juridiques à jour sur le sexe, la reproduction et la famille constituerait un progrès majeur.”

Son article dans Slate* dresse un tableau déplorable de l’état et du niveau de connaissances des élèves, de l’école primaire jusqu’au lycée, dans le domaine de la sexualité. Elle souligne les conséquences dramatiques liées à ces profondes lacunes : un taux d’IVG croissant chez les mineures, un développement des “(cyber-)violences sexistes et sexuelles chez les jeunes”, avec des taux plus élevés que la moyenne dans  l’Union Européenne, une augmentation des IST (infections sexuellement transmissibles), des conduites de harcèlement et de violences sexuelles qui s’amplifient.

 

Des manques, des lacunes et des contenus flous

Comment expliquer un tel retard ? Pourquoi l’Éducation nationale échoue t-elle à ce point dans l’enseignement de l’éducation sexuelle à l’école ? Selon Odile Fillod la mise en œuvre du projet est médiocre,  inopérante, voire contre-productive. Il lui manque un cadre précis, basé sur un dispositif clair, enseigné par des professionnels compétents. Les contenus enseignés, souvent erronés  et incomplets, génèrent flou et confusion dans les esprits et contribuent de ce fait à entretenir l’ignorance et les idées reçues. “L’éducation à la sexualité, comme la lutte contre les préjugés et violences sexistes sont lacunaires, aléatoires et autorisent la diffusion de discours problématiques par leur inexactitude scientifique, leur perspective biaisée ou leur traitement inégal des élèves.” explique t-elle. Elle déplore également que l’enseignement de “certaines disciplines (SVT notamment)”  poussent les élèves “vers les sources non fiables qui prolifèrent sur web -forums, sites d’information douteux, pornographie.” Alors quel type d’enseignement faut-il pour une connaissance responsable et respectueuse de l’autre et de son corps ?

 

Nombreuses, en effet, sont les jeunes filles y compris des femmes adultes qui ignorent encore le réel fonctionnement de leurs organes génitaux.

 

De toute évidence l’éducation sexuelle est mal enseignée. Selon Odile Fillod, il est important de transmettre une bonne instruction scientifique sur “tous les aspects biologiques du sexe et de la sexualité“. Elle propose de programmer des apprentissages essentiels permettant d’acquérir une connaissance “[…] sur la diversité et la plasticité de la sexuation biologique, l’absence de déterminisme biologique des comportements sexuels humains comme celle de “besoins” sexuels, l’anatomie et le fonctionnement du clitoris, la nature et la variabilité de l’hymen, les alternatives à la pilule pour éviter les engendrements non désirés, ou encore la transmission d’IST[…]” Nombreuses, en effet, sont les jeunes filles y compris des femmes adultes qui ignorent encore le réel fonctionnement de leurs organes génitaux.

D’une certaine manière, ce constat rejoint les propos de Serge Wunsch, spécialiste en sexologie, qui, en accord avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) souligne l’importance de développer un apprentissage de la sexualité afin de “prévenir les troubles sexuels” et de développer “la santé et le bien-être sexuel“.

Leur point de vue converge également concernant la prépondérance de l’aspect culturel de la sexualité. Odile Fillod propose de compléter les sciences de la vie par des connaissances en sciences sociales qui “[…] donneraient notamment aux élèves les moyens de prendre une distance critique vis-à-vis des pressions politico-religieuses ou mercantiles et des injonctions à adopter certaines normes de comportements sexués.

 

Former des individus critiques et responsables

Dans le but de former des êtres humains bien informés, conscients, responsables dans leur choix, et pour les préparer aux grandes étapes de la vie, Odille Fillod propose aussi un enseignement moral et civique. Il favoriserait  ainsi une meilleure maîtrise de la fécondité, des responsabilités parentales et de la vie conjugale.

Un programme complet, exigeant, mais tellement essentiel, qui manque énormément à la formation des élèves d’aujourd’hui. Un programme qui met en lumière aussi les carences du système éducatif. Un programme qui interroge sur les missions, les choix, l’orientation, et plus largement la philosophie de la vie sous-tendue par l’Éducation nationale et implicitement notre organisation sociale. Quelles connaissances pour quel type de société ? Quelles priorités pour quelles perspectives humaines ? Une proposition parmi les 100 propositions de la recherche pour la présidentielle 2017 ? Plus que ça ! L’impérieuse nécessité de, mieux connaître, pour mieux vivre son corps et respecter celui de l’autre.

 

*Slate : magazine en ligne de références. Il ouvre les débats sur des questions essentielles de notre société et propose des “Analyses, enquêtes et commentaires sur l’actualité dans les domaines économiques, politiques, diplomatiques, technologiques et culturels.”

Dans le cadre de la campagne présidentielle 2017, Slate.fr a décidé de “réunir 100 propositions de chercheurs et chercheuses, pour insuffler du carburant dans les débats. Et mettre en valeur la recherche française, trop sous-exploitée dans les politiques publiques.

 

 

 

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