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Pont des amours : le poids des serments

Le pont des amours, l’autre nom du pont des Arts, voit apparaître les premiers cadenas en 2008, sous le regard amusé et tendrement complice des passants qui, comme la mairie de Paris, accueillent cette pratique avec bienveillance. 2014, quatre ans plus tard, les parisiens voient la prolifération des cadenas d’amour dégrader les ponts, le patrimoine et leur cadre de vie. La sécurité est en jeu, notamment pour le pont des Arts. La grogne s’installe et, si la mairie reste tolérante, elle commence à réagir.

Le pont des amours, autrement dit le pont des Arts, est aujourd’hui débarrassé des cadenas d’amour et réhabilité depuis fin 2015/ début 2016. Quant au pont de l’Archevêché, c’est également chose faite depuis décembre 2016. Problème : le phénomène se déplace vers d’autres passerelles et d’autres ponts.

Pour bien comprendre le phénomène cadenas d’amour, il faut revenir un peu en arrière. C’est en 2008 que les cadenas – qui allaient devenir les « cadenas d’amour (lovelock, en anglais) »-  sont apparus sur le pont des amours. La légende rapporte que ce serait des amoureux italiens qui auraient posé ce premier symbole d’engagement.

On ne parle pas, ou peu, des cadenas d’amour avant une nuit de mars 2010 où presque tous les cadenas du pont des Arts disparaissent. La mairie nie toute participation à cette opération.

On aura le fin mot de l’histoire en juillet 2010 avec la réapparition des fameux cadenas dans une « œuvre d’art» réalisée par un étudiant des Beaux-arts aux motivations obscures et dont l’histoire (la petite pour le coup) n’a même pas retenu le nom.

Hivers 2010, le Monde.fr rapporte l’apparition des premiers cadenas d’amour sur le pont de l’Archevêché, vraisemblablement en réaction à la disparition des serments du pont des Arts.  Les amoureux auraient recherché un endroit plus sûr.

 

La résistance s’organise

Février 2014, Saint Valentin. Environ 700 000 cadenas sont accrochés aux grilles du pont des Arts. L’une d’elles vient de céder et la municipalité – l’équipe de Bertrand Delanoé – pose les premières planches pour assurer la sécurité des touristes, toujours plus nombreux à céder au rituel.Saint Valentin, serment

Mars 2014 : En pleine campagne des municipales, une lettre ouverte cristallisant le mécontentement de certains parisiens est envoyée aux candidats. Une pétition, rapidement relayée par un site en anglais et en français ainsi que par un compte Facebook et Twitter, voit le jour.

Anne Hidalgo sera élue maire de Paris en avril de la même année.

Juin 2014 : nouveau problème avec une grille saturée de cadenas qui cède. Là encore, on installe des planches, aussitôt prises d’assaut par des graffitis. Atlantico.fr explique : « La nouvelle maire de Paris voulait vider le pont des Arts de tous ces symboles et elle souhaitait réfléchir à des alternatives artistiques, solidaires et écologiques. »

 

Février 2014, Saint Valentin. Environ 700 000 cadenas sont accrochés aux grilles du pont des Arts.

 

En août 2014, la mairie lance un site destiné à sensibiliser les touristes à la sauvegarde des ponts menacés par le poids des cadenas toujours plus nombreux. Les amoureux sont incités à poster un selfi sur le site plutôt que d’accrocher un cadenas. Le succès est mitigé puisque seulement 750 photos seront déposées au moment où j’écris cet article.

Juin 2015 : la sécurité du pont des amours et des touristes qui le fréquentent devient préoccupante en raison du poids des cadenas. La municipalité ferme la passerelle et enlève les grilles pleines de serments, sans les briser ni les ouvrir. Les emplacements restés vacants sont oblitérés par des panneaux peints par des artistes. Ces panneaux seront remplacés par des vitres spéciales en décembre 2015.

Selon le Parisien.fr, ces travaux auront coûté 500 000 € avec la remise en peinture des lampadaires et des bancs. Si on considère que le pont des Arts était lesté de 700 000 cadenas, un rapide calcul nous apprend que chaque pose d’un serment aura coûté 1,40 € à la municipalité.

 

Sur le pont de l’Archevêché et plus loin…

En janvier 2016, le pont de l’Archevêché est nettoyé de 35 tonnes de cadenas. Il faudra attendre une seconde campagne, en décembre 2016,  et le retrait de 20 tonnes de cadenas pour que la municipalité entreprenne la pose de plaques de verre similaires à celles posées sur le pont des Arts.

Tant qu’une solution pérenne ne sera pas trouvée, à chaque sécurisation d’un pont, les cadenas se déplaceront plus loin. C’est déjà le cas sur les passerelles léopold-Sedar-Sanghor et Simone de Beauvoir, laquelle est pourtant située assez loin du centre historique de la capitale.

Contrairement à Rome et à New York, Paris n’envisage toujours pas de répression en faisant payer une amende aux amoureux récalcitrants.

2 thoughts on “Pont des amours : le poids des serments

  1. Je suis tout à fait d’accord avec toi. Pris isolément, un serment matérialisé par un cadenas, est perçu comme un acte romantique. Sauf qu’un cadenas pèse 300grammes en moyenne. Et quand il y en a des milliers, ça pèse ! Et en plus, au bout d’un moment, c’est moche !
    Aussi pourrait-on envisager deux solutions :
    – La première consisterait à proposer un lieu dédié à l’accrochage des cadenas. Mais le problème persisterait car, au bout d’un certain temps, il faudrait forcément en enlever pour être en mesure d’en accueillir de nouveaux – pas cool pour les amoureux qui se sont déplacés depuis l’autre bout du monde pour matérialiser leur serment à Paris.
    – La seconde serait de proposer aux amoureux du monde entier un autre moyen de se déclarer leur flamme. Un système plus pérenne qui prendrait en compte la qualité de vie des parisiens, l’environnement, le tourisme, le romantisme de l’une des plus belle ville du monde et SURTOUT les amoureux.

  2. Quelle tristesse de voir l’architecture parisienne se dégrader ainsi. Pourtant, les amoureux partent d’une bonne intention en voulant symboliser l’un amour.

    Une bonne campagne de sensibilisation auprès des touristes est selon moi nécessaire pour commencer à éradiquer ce fléau.

    Très bon article.

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